Immunothérapie: empêcher notre cerveau de propager la maladie de Parkinson

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En vieillissant, la probabilité de déclarer une maladie neurodégénérative augmente. La maladie de Parkinson est la deuxième maladie neurodégénérative la plus commune, juste après la maladie d’Alzheimer [1]. De nombreux traitements existent afin d’en atténuer les symptômes, mais jusqu’ici, aucun n’a pu réellement enrayer la progression de cette maladie. Néanmoins, la gravité de ses conséquences pousse le monde de la recherche à explorer toujours plus de pistes prometteuses pour enfin en venir à bout.

C’est ainsi qu’au début du mois d’août un rassemblement de chercheurs venant des États-Unis et de Corée du Sud publie dans Molecular Neurodegeneration un article pouvant changer la donne [2]. Leur méthode pour battre la maladie de Parkinson: empêcher les cellules du cerveau de la propager.

La maladie de Parkinson: comment se propage-t-elle?

Pour comprendre le raisonnement utilisé dans cette étude, il est important de savoir comment la maladie de Parkinson se propage. Ou, en tous cas, comment les connaissances actuelles permettent d’expliquer sa propagation.

La maladie de Parkinson est due à la formation de blocs d’une protéine dans les neurones: l’α-synuclein. En temps normal, cette protéine est utilisée par certains de nos neurones et est totalement non toxique. Hélas, si les protéines d’α-synuclein s’accumule un peu trop dans un neurone, elles peuvent s’agglomérer. On parle alors d’agrégats. Ces agrégats, eux, sont très toxiques. De plus, la machinerie de dégradation des protéines de nos cellules n’arrive pas à les détruire. Ainsi, les neurones touchés meurent, ce qui alerte le système immunitaire du cerveau. Celui-ci, en se débarrassant des neurones mourants, provoque une inflammation importante qui fragilise les neurones alentours.

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Mais comment expliquer qu’un phénomène local finisse par gagner de larges régions du cerveau? Il semblerait que les neurones, incapables de se débarrasser des agrégats, les partagent avec les cellules alentours. Ce phénomène ressemble à une simple répartition du travail de dégradation. Pourtant, il possède un fort désavantage. Les autres cellules étant aussi incapables de détruire les agrégats, ceci ne ferait que permettre leur propagation.

TLR2: un complice de Parkinson?

TLR2 appartient à la famille de Toll Like Receptors. Il s’agit de protéines qu’utilisent nos cellules pour sentir la présence d’éléments dangereux dans leur environnement. Dans leur travaux précédents, les chercheurs ont montré que TLR2, à la surface des neurones comme des cellules immunitaires du cerveau, se fixait aux agrégats. Cette fixation aurait deux effets néfastes. Premièrement, elle empêcherait les neurones de réaliser l’autophagie, processus qui pourrait les aider à survivre [3]. Deuxièmement, elle provoquerait d’importantes inflammations via les cellules immunitaires [4].

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Les chercheurs décident alors d’observer la répartition de TLR2 dans le cerveaux de patients atteints par Parkinson. Ils remarquent alors que contrairement aux cellules de cerveaux sains, celles des malades exprimaient bien plus TLR2. Forts de leur découvertes, ils décident alors de développer une souris modifiée génétiquement pour continuer leurs expériences. Ces souris produisent bien plus d’α-synuclein que les souris normales et développent les mêmes problèmes au cerveaux que les patients. Et là encore, TLR2 est bien plus exprimé par les cellules du cerveau.

Mais comment être sûr que TLR2 est bien responsable, du moins en partie, des dommages observés? Pour répondre à cette question, les chercheurs forcent les cellules du cerveau des souris exprimant déjà plus d’α-synuclein que la normale à également exprimer plus TLR2. Le résultat est là: les symptômes Parkinsoniens sont aggravés.

TLR2: la cible à abattre par immunothérapie

Si TLR2 paraît nocif en cas de symptômes Parkinsonniens, pourquoi ne pas l’empêcher d’agir? C’est le raisonnement qu’appliquent alors les chercheurs. Ils décident de développer un anticorps spécifique, se fixant sur TLR2 et l’empêchant de fonctionner. Pour vérifier si ce type d’immunothérapie serait efficace, ils l’utilisent pour traiter leurs souris modifiées génétiquement. Ils observent alors des résultats frappants.

Dans un premier temps, ils comparent alors l’apparence générale des souris transgéniques traitées ou non. Ils observent ainsi que les souris non traitées développent les symptômes de la maladie de Parkinson, mais pas celles aillant reçu l’anticorps anti-TLR2. En effet, le nombre de neurones ne chute pas chez les souris traitées, l’inflammation est contenue et même le nombre d’agrégats est diminué! Néanmoins les chercheurs s’interrogent sur ce dernier point: comment se fait-il qu’il y ait moins d’agrégats? Ils décident alors de vérifier si TLR2 n’intervient justement pas dans le phénomène de transmission des agrégats que nous avons mentionné précédemment. Celui-ci contribue en effet largement à l’augmentation du nombre d’agrégats en « contaminant » d’autres cellules. Pour le vérifier, ils regardent au microscope le déplacement de ces agrégats entre des cellules du cerveau in-vitro. Et là, surprise: en présence de l’anticorps anti-TLR2 les déplacements sont fortement ralentis.

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Ainsi, s’en prendre à TLR2 semblerait ralentir significativement l’avancée de la maladie de Parkinson. Plus encore, cette étude montre qu’envisager une immunothérapie dirigée contre TLR2 est une piste très prometteuse pour de futurs traitements.

Références:

[1] Lee HJ, Bae EJ, Lee SJ. Extracellular alpha–synuclein-a novel and crucial factor in Lewy body diseases. Nat Rev Neurol. 2014;10:92–8

[2] Kim C, Spencer B, Rockenstein E, Yamakado H, Mante M, Adame A, Fields JA, Masliah D, Iba M, Lee HJ, Rissman RA, Lee SJ, Masliah E. Immunotherapy targeting toll-like receptor 2 alleviates neurodegeneration in models of synucleinopathy by modulating α-synuclein transmission and neuroinflammation. Mol Neurodegener. 2018 Aug 9;13(1):43.

[3] Kim C, Rockenstein E, Spencer B, Kim HK, Adame A, Trejo M, Stafa K, Lee HJ, Lee SJ, Masliah E. Antagonizing neuronal toll-like receptor 2 prevents Synucleinopathy by activating autophagy. Cell Rep. 2015b;13:771–82

[4] Kim C, Ho DH, Suk JE, You S, Michael S, Kang J, Joong Lee S, Masliah E, Hwang D, Lee HJ, et al. Neuron-released oligomeric alpha-synuclein is an endogenous agonist of TLR2 for paracrine activation of microglia. Nat Commun. 2013;4:1562.

Baptiste Tesson

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Baptiste is studying biology at the École Normale Supérieure de Lyon and bioengineering at the École Polytechnique Fédérale de Lausanne. He worked on the optimization of Cas9 as a tool for genome editing and on the emergence of blood stem cells in the zebrafish. He currently works on the patterning of the muscles, also in the zebrafish. He plans on doing a PhD in developmental biology.

More about the Long Long Life team

Baptiste étudie la biologie à l’École Normale Supérieure de Lyon et la bioingénierie à l’École Polytechnique Fédérale de Lausanne. Il a travaillé sur l’optimisation de la protéine Cas9 comme outil de modification de génomes et sur le développement des cellules souches du sang chez le poisson zèbre et travaille actuellement sur la mise en place des muscles chez le même animal. Il projette de réaliser un doctorat axé vers le développement animal.

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